Contraste

Par Michel Théron

Certains (contrastes) sont sidérants. Ainsi ce que je viens de lire dans une lettre d’information que je reçois quotidiennement par voie électronique : « Des Français, sans lien avec l’Ukraine, partent en Ukraine pour se battre ou pour aider la population locale. Le PSG propose un salaire de 50 millions d’euros nets annuels et une prime de 100 millions (nets) à Mbappé. » (02/03/2022)

Il me semble que la pure juxtaposition sans transition de ces deux nouvelles est extrêmement parlante : elle définit parfaitement non seulement l’état actuel de notre civilisation, mais encore ce qu’on peut penser en général de l’être humain. Il est à la fois admirable dans la générosité dont il fait preuve, et détestable dans ce qu’il admet comme type de société. Cette dualité le détermine tout entier. Il est capable du meilleur et du pire. C’est un milieu entre rien et tout, comme dit Pascal.

Braves Français d’une part, qui sans lien particulier avec un pays agressé se décident à partir pour l’aider, et à y risquer leur vie ! On pense aux Brigades Internationales lors de la guerre d’Espagne. Donc l’homme est capable de subordonner son intérêt vital à des valeurs qui le dépassent, en l’occurrence la défense de la liberté. Ce total désintéressement force l’admiration.

Mais d’autre part aussi pourquoi admet-il chez nous le règne absolu de l’argent, incarné par le salaire stratosphérique d’un footballeur, véritable insulte à ceux qui n’ont pas de quoi vivre ? Une révolte là serait bienvenue, face à un système indécent. On l’attend toujours.

Pendant la crise du Covid, on espérait qu’une fois terminée elle s’ouvrirait sur un « monde d’après » tout différent de celui qu’on avait connu jusque là, plus raisonnable, plus frugal. Mais ce monde n’est pas arrivé. La dictature de la performance économique, le règne inexpiable de l’argent sont repartis de plus belle. On a applaudi au retour de la sacro-sainte croissance, et tout a recommencé comme d’habitude : business as usual.

Jusqu’à cette guerre initiée par la folie. Sera-t-elle l’occasion d’un sursaut, où sombreront enfin matérialisme et cupidité ? On n’en voit pas bien le début, puisqu’on se demande maintenant chez nous, de façon totalement égocentrique, en quoi la guerre influera sur notre porte-monnaie. Il faudrait demander aux Ukrainiens sous les bombes ce qu’ils en pensent. Sans doute nous diront-ils de remplacer un pouvoir d’achat par un simple pouvoir vivre.

Michel Théron, www.michel-theron.fr

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