Vivre « sans mourir » !

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Mes certitudes sont peu nombreuses, et même, avec la moisson de mes années, de moins en moins nombreuses. Pourtant, j’ai toujours été émerveillé par « la vie » et je continue à l’être de plus en plus. Fasciné par tout ce que la vie de chaque être, de chaque cellule représente ; ce grain de vie que l’homme peut altérer, tronquer mais ne peut pas « créer » autrement que par  « procréation ».  Fasciné par ma vie aussi bien sûr. Bien que celle-ci ne soit pas « un long fleuve tranquille », loin de là. Et je crois, je crois de plus en plus fermement, que la ‘vie’ de chacun est immortelle. Comme tout un chacun, je vis, je vivrai toujours …

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J’essaie de vivre le plus positivement, le plus complètement, le plus harmonieusement possible, même si c’est encore bien modestement… Et mon cheminement ne s’achèvera pas avec la mort … Je sens en effet, aujourd’hui, que ma vie ne s’arrêtera pas avec mon départ de terre. Ma conviction actuelle est que l’essentiel en moi ne mourra pas. Mon apparence sous le visage que mes proches connaissent disparaitra bien sûr mais ma vie se prolongera sous une autre forme, d’une autre façon. Je suis incapable de préciser sous quel aspect et je ne cherche nullement à clarifier cette « foi » mais c’est pour moi plus qu’une hypothèse mais une conjoncture probable ! Un espoir d’ailleurs en même temps qu’une conviction. Je ne ressusciterai donc jamais comme le laisse entendre la perspective chrétienne … Car ce n’est absolument pas imaginable puisque je ne « mourrai » pas !

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La résurrection de Jésus – présentée comme un miracle unique et exceptionnel – a permis au christianisme de bâtir et de justifier l’édifice intellectuel sur lequel notre culture s’est construite. Pour ma part, je n’arrive plus à partager cette mystification. Pas plus d’ailleurs que la naissance divine de cet homme dont la mère reste vierge. Je n’ai pas les arguments ou l’analyse qui peuvent accréditer une telle « foi » mais je n’ai plus la docilité de ma jeunesse ou la souplesse de ma confiance envers les docteurs de l’Église qui ont bâti des « vérités » dogmatiques pour imposer ce qui me semble maintenant invraisemblable, in-croyable.

Comme les religions antiques, le christianisme a certainement, pour faciliter un envoûtement, créé un halo de magie que les textes fondateurs ne justifient pourtant en rien mais qui reste prégnant dans la culture chrétienne : un Dieu unique mais « multiplié en Trinité » ; Jésus, un homme –Dieu ; Marie qui enfante en restant vierge et chaste ; des prêtres qui participent à un sacrifice sur l’autel pour transformer un morceau de pain en chair divine … Comme beaucoup d’hommes assoiffés d’authenticité aujourd’hui, je ne peux partager une religion qui exploite un paganisme chrétien avec l’enseignement de Jésus et la base incontournable des évangiles …

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Les grands sages de ce monde, les Siddhârta, Lao tseu, Eckhart, Krisnamurti, comme Jésus, sont des éveillés, des accomplis, des êtres évolués. Mais ils ne sont que des hommes dans leur cheminement sur terre. Totalement hommes et uniquement hommes, même si leur évolution les conduit pas à pas à la divinité où tout homme est invité, comme nous aussi bien sûr !

Si, dans la culture juive, la mort met un terme final à la vie, dans d’autres cultures comme l’hindo-bouddhisme, la mort n’existe pas. « Rien ne disparaît, tout se transforme » : la mort n’est qu’un passage vers une autre forme de vie, soit une renaissance, soit le nirvâna c’est-à-dire une forme de vie éternelle, dans un autre espace-temps que le nôtre. Jésus est parvenu –selon ma modeste interprétation- à un tel niveau de réalisation humaine et spirituelle qu’il n’a pas eu à renaître pour mener à terme cette montée vers l’Éveil, que nous accomplissons tous douloureusement. Il n’a en réalité jamais cessé de vivre. Sa mort n’a été que le passage d’une forme de vie humaine à une forme de vie dont nous ne savons rien, sinon qu’elle nous attend nous aussi. Il n’est donc jamais mort et n’a pu davantage ressusciter.

Jésus mort a été enseveli. Et si son cadavre a disparu, ce n’est pas parce qu’il a ressuscité mais certainement parce que ses amis ont voulu le protéger et le récupérer ! Et ce n’est d’ailleurs pas ce qui l’empêche d’être encore vivant sous une autre apparence puisqu’il a été vu sans être reconnu sur le champ … Aussi surprenant que cela puisse paraitre, il est en effet possible de continuer à partager avec un mort qui reste proche et certains peuvent ainsi nouer une relation étroite et réelle avec un défunt …

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Quand les contraintes de la vie professionnelle se sont dissipées, quand celles de la vie familiale s’estompent et que l’on mesure ce qui reste encore essentiel pour nous, il n’est plus possible de se noyer dans le travail ou de se dissimuler derrière des habitudes ou des croyances aveuglantes ou faciles. La sincérité invite plutôt à une lucidité crue … Le dépouillement des forces, l’isolement progressif inévitable et aussi, la proximité de la fin de vie sur terre lèvent les dernières amarres qui attachent aux conventions, aux bienséances du passé. Le présent ne nous laisse plus le temps de la conformité ou de l’indécision. Il attise le désir de transparence, de vérité personnelle qui sourd en nous…

Je ne cherche nullement à convaincre quiconque ou à divulguer des convictions par prosélytisme. Je devine bien mes fragilités, mon appréhension, mes limites. Je sais mes modestes compétences dans ce domaine spécialisé où des théologiens de renom livrent leur analyse mais je ne peux taire mon intuition, ma sensibilité et ma sincérité. En précisant mes convictions et mes doutes de ce moment.

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Pascal JACQUOT

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