qui souhaitent dépasser les dogmes et morales étriquées du christianisme traditionnel …
Beaucoup de nos contemporains chrétiens – ils ne sont pas les seuls – sont en quête de valeurs profondes et ils sont désireux, à l’aide de leur conscience, de leur raison et des résultats des sciences de penser le monde et le mystère de l’homme d’aujourd’hui. Débarrassés du fatras des dogmes, de l’organisation cléricale et de la morale soi-disant chrétienne, ils sont nombreux à découvrir un nouveau portrait de l’homme Jésus de Nazareth, dépouillé des titres pompeux dont on l’a affublé et de son statut d’homme divin qu’on lui a conféré solennellement et définitivement dans les premiers conciles des IVe et Ve siècles de notre ère.
Jésus redevient alors ce qu’il était en son temps : le croyant laïc, ni prêtre, ni théologien patenté, qui s’est levé pour dénoncer les perversions religieuses de son époque, le ritualisme et le légalisme ; le maître en humanité qui a consacré sa vie à redonner confiance et dignité aux marginalisés ; le compagnon fraternel qui s’est dépensé sans compter pour rejoindre et accompagner les rejetés, les découragés, les accablés par toute sortes de souffrances et de handicaps ; l’homme universel qui ne faisait pas de distinction entre les humains, tous égaux à ses yeux, tous objets de respect et d’amour, tous conviés à vivre en frères ; l’homme de Dieu pour qui, non seulement les deux commandements étaient égaux – l’amour désintéressé du prochain et l’amour de Dieu invisible – mais pour qui l’amour véritable de son prochain est le critère déterminant de l’amour de Dieu et le vrai « culte » en esprit et vérité …
En remplaçant le terme de religion, devenu si ambigu, par celui de « Voie », les chercheurs de Sens qui se réfèrent à Jésus délaissent le Dieu figé et invraisemblable du christianisme traditionnel : un Dieu qui aurait créé le monde et tout ce qui existe, et en dernier lieu l’homme par une intervention spéciale de sa part ; un Dieu qui conduirait en sous-main l’histoire humaine et les destins individuels, qui rétribuerait le bien et punirait le mal ; qui pourrait, grâce à sa puissance, opérer des miracles dans l’univers et dans la vie des individus ; un Dieu qui aurait parlé pour se faire connaître et pour révéler aux hommes comment se comporter en humains. Ils se tournent alors vers « la Source ultime de la Réalité, comme la plus profonde du Cosmos, comme le Cœur qui le fait battre, comme l’Esprit et l’Âme qui le maintiennent vivant, comme l’Énergie « amoureuse » qui le génère et le supporte ; comme l’Attraction qui remplit tout, qui entraîne tout, qui relie tout afin d’élaborer l’immense architecture cosmique toujours en marche vers plus de complexité [1] … » Dans cette démarche, Jésus, par l’esprit qui l’a animé, est initiateur de cette « Voie ».
Finie alors l’identification de la Source avec des doctrines dogmatiques traditionnelles qu’il faut apprendre, finie sa confusion avec les mises en scène des liturgies religieuses éthérées, présidées par des prêtres et des pontifes en tenue d’apparat auxquelles assistent passivement des croyants dociles, finies les prétentions de leur part de régenter la pensée et les conduites du monde sécularisé …
Une attitude de lucidité et de création exigeante, mais enthousiasmante et sans a priori, invite ainsi les chrétiennes et les chrétiens insatisfaits à trouver une manière moderne et neuve d’être « croyants chrétiens » au XXIe siècle ! Et si les uns et les autres nous nous manifestions, nous nous retrouvions, nous nous rassemblions pour échanger sur ce que nous croyons et pour vivre ce qui nous anime profondément ?
En octobre 2019, nous étions 140 à nous réunir à Paris. Depuis, nous avons publié trois lettres adressées aux membres du réseau. La pandémie a empêché de nouvelles rencontres. Elles reprendront en 2022.
Les animateurs du groupe “Pour un christianisme d’avenir” :
Robert Ageneau, Serge Couderc, Paul Fleuret, Jacques Musset, Philippe Perrin
[1] Bruno Mori, (Pour un christianisme sans religion. Retrouver la « voie» de Jésus de Nazareth, Karthala, 2021, p. 248)
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Le problème n’est pas de savoir s’il sera possible de restaurer l’entreprise ‘Église’, selon les règles de restauration de toutes entreprises. La seule question qui vaille est celle-ci : se trouvera-t-il des chrétiens pour vouloir rechercher ces ouvertures priantes, errantes, admiratrices ? S’il est des hommes qui veuillent encore entrer dans cette expérience de foi, qui y reconnaissent leur nécessaire, il leur reviendra d’accorder leur Église à leur foi.
Michel de Certeau
La faiblesse de croire