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Par Robert Ageneau
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Bernard Besret, dont la trajectoire humaine et intellectuelle est particulièrement riche, a publiée fin 2023 un petit livre intitulé “Sonder l’insondable”[1]. Nous connaissons l’histoire du jeune Breton qui entra à 18 ans, en 1953, à l’abbaye cistercienne de Boquen, restaurée par Don Alexis Presse. Bernard n’avait pas vraiment reçu de formation chrétienne, sa famille et surtout son père étaient non pratiquants. Ses études secondaires avaient suivi la filière scientifique. Mais Bernard était assoiffé d’absolu. Il pensait le trouver dans la vie monastique.
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Boquen ne sera pour lui qu’une première étape. Son but était d’ouvrir l’abbaye aux chrétiens en recherche, après le concile vatican2, et de partager expériences et questions. Il fut désavoué en 1969 par les autorités de l’Église et revint à l’état laïc.
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« Sonder l’insondable » est un petit ouvrage dense et concis, présenté par ses amis comme son testament spirituel. Besret s’intéresse à un possible au-delà la mort. Il ouvre cette question à l’aide des dernières connaissances de la science, de l’apparition de l’énergie et de l’évolution du Cosmos à la vie organisée et à l’émergence de l’Homo sapiens. Il écrit :
« Le Big Bang n’est qu’un moment, certes privilégié, certes capital pour la compréhension du monde, mais il n’est qu’un instant du phénomène global de la Création. Celle-ci est relation permanente de tout ce qui existe au fondement qui s’exprime en lui ».
« En dépit de l’inaccessibilité du fondement ultime de l’univers, toutes les traditions philosophiques se sont efforcées de s’en approcher et de le cerner, ne serait-ce que par une approche négative, en éliminant tout ce qui n’est pas ».
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Avec l’hypothèse d’un fondement de l’être, c’est la reprise de « Dieu au-delà de Dieu » dont parlait Maître Eckhart et dont Besret a retrouvé d’une autre manière la trace dans la quête taoïste. S’il reconnait employer le mot Dieu par commodité, c’est pour en chasser les représentations périmées.
Le côté scientifique de sa culture amène notre auteur à évoquer le rôle de l’information en lien avec la physique quantique, une des grandes découvertes du XXème siècle encore en débat aujourd’hui. « La théorie quantique est au fond une théorie de l’information. Cette dernière est une chose physique, une priorité concrète qui s’exprime dans la matière et dans l’émergence … chaque particule subatomique, chaque atome, chaque molécule, chaque cellule, chaque vivant, chaque étoile et chaque galaxie fourmillent d’informations.[2] »
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B. Besret en arrive au point essentiel de son propos : la mort est une transition informationnelle :
« J’affirme que cette signature, cette trace, cette projection d’une vie, hors espace, hors temps, est le support d’une autre forme de la conscience cérébrale. Traduit en d’autres termes, la potentialité porteuse d’un certain niveau de conscience (dans l’au-delà) est plus importante que la conscience telle qu’elle s’est exercée au cours de son actualisation terrestre ».
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Besret reconnait que nous avons du mal à imaginer les caractéristiques de cette conscience dans l’au-delà, car « elle sera bien différente de la conscience atomisée dont nous jouissons habituellement sur terre. Cette conscience bénéficiera d’un champ de vision universelle ».
En conclusion de son essai, l’auteur parle de la mort comme le jour qui illumine. Il la présente comme une vie au-delà de l’espace-temps : « Elle ouvre un vaste portail sur une vision qu’englobe tout ce qui a été, ce qui est, ce qui sera dans une relativité totale du temps, dans l’instantanéité d’un coup d’œil qui ne connait aucune durée. »
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J’ai tenté ici un résumé de ce petit livre qui nous propose des hypothèses sur l’existence des vivants au-delà de leur mort terrestre. Si elles nous paraissent crédibles, ce petit livre rendra un grand service, tant nous voyons partir nos proches, des amis chers, sans parler des inconnus innombrables qui nous ont précédés. De mon point de vue, ce petit livre éclaire réellement sur un sujet difficile. Il apporte un point de vue neuf sur un profond mystère.
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R.A.
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[1] Editions Marie Romaine, 2023, 92 p, 18€
[2] Citation de « La clé de Salomon », livre de José Rodrigues dos Santos
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Pour en savoir plus :
Un diaporama de Etienne Godinot sur Bernard Besret présente une spiritualité de plein vent pour le 3ème millénaire.
(B. Besret : né en 1935, moine cistercien, prieur de l’abbaye de Boquen, destitué en 1969, ex-responsable des relations internationales à la Cité des Sciences et de l’Industrie de la Villette, philosophe et écrivain passionné par le taoïsme et l’interconvictionnalité)
https://www.irnc.org/IRNC/Diaporamas/3079
Article “Sonder l’insondable” :
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A propos des idées de Bernard Besret je ne nie pas et je ne partage pas l’hypothèse d’une réalité “divine” qui donne sens à notre existence.
Mais je ne connais, en ce qui me concerne, que cette vie que je vis et je n’ai aucun moyen de vérifier l’hypothèse d’une survie personnelle après ma mort !
Et je peux désirer très fortement quelque chose qui n’existe pas, cela ne la fera pas exister par magie … s’il est impossible qu’elle existe.
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Cette vie qui est la mienne, pour moi, comme pour ceux qui m’ont précédé et nous ont quittés, aboutit à la destruction totale de mon corps, donc de ma conscience que l’organisation de ce corps permet.
Ailleurs, je ne sais où, ni quand, dans un univers dont je ne peux avoir nulle idée, sauf sous la forme romanesque de la fiction, que ce qui fait que je dis JE-MOI puisse avoir résisté à la disparition définitive.
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J’ai vu à la télévision un documentaire dans lequel une petite fille d’une dizaine d’année disait à propos des prétendues vertu du clonage comme étape des processus de cryogénie pour atteindre sinon l’immortalité du moins une vie beaucoup plus longue “ce moi ne sera pas moi. Car je suis en tout un exemplaire unique. Même si j’avais une jumelle à 100% il est clair qu’elle ne saurait être moi car dés sa conception elle aurait une place différente de moi dans l’ utérus de notre mère”
Et trois minutes environ, si rien n’est fait, après l’arrêt de mon cœur, le sang n’arrivant plus au cerveau, celui ci est détruit définitivement
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“Vivez des aujourd’hui n’attendez à demain
Cueillez dés maintenant les roses de la Vie”
Ronsard
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C’est vrai qu’il n’y a pas de roses sans épines…
Même la rose du Petit Prince en a.
Amitiés
Jean
Bonjour,
Par rapport à la réflexion de Jean : “Mais je ne connais en ce qui me concerne que cette vie que je vis et je n’ai aucun moyen de vérifier l’hypothèse d’une survie personnelle après ma mort”
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Je me permets de partager ma pensée, si vous me le permettez. Il me semble qu’il existe pas mal de témoignages d’expérience de mort imminente assez convaincants. Bien sûr, il faut discerner chaque témoignage car certains sont un peu new age, mais beaucoup témoignent d’une réalité divine conforme à la révélation judéo-chrétienne. Cette révélation que Dieu nous a donnée pour que nous ne le cherchions pas dans le vide mais que nous y trouvions une boussole pour notre vie. Et puis on peut voir Dieu aussi à travers la beauté de Sa création – de la nature, des animaux. Quand on prend le temps de s’émerveiller devant tout cela, il devient évident qu’une cause intelligente en est à l’origine. Le hasard ne peut pas créer toutes ces merveilles.
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Je pense que ce que l’homme a perdu aujourd’hui, c’est cette capacité à s’émerveiller et de voir autour de lui les messages que la Providence divine lui laisse à travers Sa création.
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Prenez par exemple (je voyais ça l’autre jour dans un livre sur le monde animal) ces chenilles recouvertes de faux yeux pour se protéger de prédateurs. Tout a été pensé et montre le souci du Créateur pour ses créatures en leur donnant à chacune des moyens de se défendre et de se protéger. Pensons aussi à ces papillons dont les ailes sont parfois de véritables œuvres d’art. J’aime bien l’image de la chenille car elle figure quelque part ce qu’est notre vie et ce à quoi nous sommes appelés. Après ce temps de préparation sur terre nous quitterons ce corps et nous envolerons vers l’Éternité et cette brève et douloureuse existence ici-bas ne sera plus qu’un lointain souvenir.
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Enfin, l’homme n’est pas qu’un corps, il a aussi une âme et un esprit. Au moment de la mort, le corps retourne certes à la terre (avant d’être ressuscité et rendu incorruptible lors du Jugement Dernier) mais l’âme (qui est immortelle) entre dans l’éternité où elle doit répondre de tous les actes d’amour qu’elle a rendu ici-bas quand elle était dans son corps (voilà le sens de notre existence, comme le disait sainte Thérèse de Lisieux, “apprendre à aimer” car c’est sur l’amour que nous serons “jugés” au soir de notre vie).
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Amicalement,
Philippe
J’adhère à ce que dit Philippe. Nous manquons cruellement de capacité à l’émerveillement. La création est tellement magnifique! Qu’en faisons nous?
J’émettrais une nuance pour le jugement dernier. Je suppose qu’à l’heure de notre mort notre conscience s’éveille totalement et nous jugeons nous même notre parcours terrestre. Ce sont les révélations de personnes vivant des E M I qui me font penser à cette hypothèse. J’aime beaucoup l’image de la chenille et du papillon. Notre devenir papillon peut être comme dit la bible ” ressusciter avec notre corps de gloire comme le christ est apparu à ses disciples.
Amitiés
Michèle
Dans « Sonder l’insondable », Bernard Besret précise son objectif : mettre des mots sur la vision de la mort pour la rendre moins mystérieuse, moins difficile à appréhender :
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« La conscience dans l’au-delà bénéficiera d’un champ de vision universelle. La mort, vie au-delà de l’espace-temps, ouvre un vaste portail sur une vision qui englobe ce qui a été, ce qui est et ce qui sera dans une relativité totale du temps, dans l’instantanéité d’un coup d’œil qui ne connait aucune durée.
Parler de la mort, c’est évoquer un réel ultime dont nous savons par avance que tous nos mots sont impuissants à le cerner. Je n’affirme pas, je propose simplement des hypothèses que je juge plausibles, vraisemblables.
L’intuition qui m’habite depuis des décennies est que l’information contenue par l’univers ne peut pas mourir. Il n’y a pas un pas, un souvenir, pas un chagrin qui puisse être oublié. En tant qu’individu vous disparaitrez dans le tourbillon du temps, vos molécules seront dispersées. Mais ce que vous étiez, ce que vous avez fait, la manière dont vous avez vécu resteront à jamais intégrés au calcul universel. (…) La mort est une transition informationnelle. Ne la redoutons pas. Quand le corps meurt, l’information créée par la vie qui l’habitait change de forme et de structure, mais elle n’est pas perdue. Nous laissons comme une trace informatique sur le disque dur de l’univers.
Et nous ne subirons que notre propre jugement. Il faut essayer de faire de notre vie une œuvre d’art . »